⇦RetourNotes sur une famille de petites églises romanes. Exposé de Robert Bornecque, historien de l'art; professeur émérite à l'université de Grenoble et président de l'Académie Delphinale, fait lors de notre assemblée générale du20/04/07. Photos de Robert Bornecque pour l’exposé, complétées par celles de Jean Escaron ou autres pour la partie rédaction. Exposé: Ce
que l’on a appelé par la suite « art lombard » ou encore
« premier art roman » apparaît dans la plaine du Pô, mais
aussi en Catalogne dans le courant du XI ième siècle.
Les bâtisseurs expérimentent divers modes de voûtement ainsi que leurs
moyens de contrebutement, souvent avec maladresse, parfois avec audace.
Les caractères essentiels sont les suivants : une maçonnerie de
pierres taillées au marteau et liées au mortier ; par le jeu de
saillies et de creux, certaines surfaces murales sont ornées de bandes
verticales ( lésènes ou bandes lombardes) reliées entre elles à leur
sommet ou à divers niveau par des festons, petites arcatures, souvent
en nombre impair. Moustier Sainte Marie Photo SKO Ces églises sont voûtées en pierre et dotées d’un clocher, généralement isolé, élancé et coiffé d’une pyramide de pierre (exemples à Isola, Saorge, Moustier Sainte Marie etc.). A la fin du XI ième siècle, l’architecture atteint un grand degré de perfection. Les murs sont exécutés en moellons taillés ajustés à joints vifs, les dimensions peuvent devenir considérables (Abbatiale de Cluny III) Dans les Alpes, le mode de décor lombard se perpétue largement dans le XII ième siècle, tout en adoptant la technique de maçonnerie à joints vifs. Cette mode remonte jusqu’à la Savoie (St Pierre d’Extra-Vache en Maurienne ). La région de Grenoble en conserve des exemples intéressants, notamment toute un famille de clochers.
Notre Dame de Mésage Clocher de Notre Dame de Mesage Notre
Dame de Mésage montre les problèmes rencontrés par les constructeurs.
Pour respecter l’orientation de l’église, il fallut remblayer le pente.
Le poids du chevet a provoqué des tassements qui imposèrent rapidement
la pose de gros arcs de soutènement. Le clocher fut jugé trop lourd
pour reposer sur la voûte et son soubassement traverse cette dernière
et s’appuie sur le sol en une sorte de cage qui encombre la perspective
vers le chœur. C’est la partie extérieure de ce clocher qui présente le
plus d’intérêt. Il ne s’élève que sur un court étage de plan
rectangulaire couvert d’une pyramide de pierre, sans doute restaurée au
cours des âges. Chaque face de la souche est dotée de deux baies
jumelles qui reposent sur une colonnette médiane. Aux angles montent deux
bandes lombardes reliées, suivant les faces, par trois ou quatre
festons. Nous trouvons donc ici un procédé de l’art lombard bien
caractéristique, mais au XII ième siècle seulement. Saint Firmin Photo X A proximité, la chapelle Saint Firmin se rapproche de ce modèle. Le clocher flanque l’église au nord (au lieu de coiffer le choeur) la flèche est plus aiguë (restaurée, comme le signale la boule qui la termine) et les festons plus nombreux (six par face). L’appareil est d’une grande qualité de taille des pierres. Il est facile d’ajouter d’autres membres à cette famille, qui modulent des variations sur les thèmes de base.
St Georges de Commiers Photos Bornecque St Pierre de Commiers
A Saint Pierre de Commiers (clocher conservé contre une église moderne) le premier étage s’ouvre par deux ou trois baies sur colonnettes, encadrées de bandes lombardes et de festons (par cinq). L’étage supérieur n’a pas de décor. A
Varces (église moderne) les baies du clocher s’ouvrent dans un mur nu
et la pyramide terminale présente à la base une baie minuscule. Saint Pierre de Sassenage Photo SKO A Sassenage, la haute tour compte deux étages de baies, avec bandes lombardes et festons au niveau supérieur. Au clocher de Saint Pierre d’Allevard, l’étage unique s’ouvre sur deux baies sur colonnettes surmontées de quatre festons. La pyramide qui déborde sur la souche a été refaite à l’époque classique (griffons d’angle, boule sommitale). Citons, sans épuiser la liste, la façade de Saint Jean le Vieux qui paraît plus ancienne (deuxième moitié du XI ième siècle). Sous le large pignon, le mur s’orne de trois panneaux couronnés chacun par trois festons reçus par des bandes lombardes.
Gravure de Diodore Raoult Dessin Bornecque
d’après
le croquis de D.Raoult Les croquis de Diodore Raoult,( vers 1835) nous montrent le clocher de Saint Michel de Connexe en ruine, sur lequel on constate les éléments qui le rattachent à la famille que nous venons de présenter. L’église disposait d’un transept, élément exceptionnel dans ces édifices modestes. Le clocher couvrait la croisée. Ses parois reposaient sur les quatre arcs qui encadraient cet emplacement et reposaient sur des colonnes engagées dans les murs. Deux arcs, perpendiculaires, subsistaient encore à l’époque du dessin, ainsi que deux cotés de la souche du clocher avec une large amorce de la pyramide. On distingue bien la présence de festons au dessus des baies. Les restes du clocher vers 1911 et du fond de nef à gauche. Photo Ferrand Le dernier arc qui ouvrait sur la nef, s’est effondré vers 1980. Je l’avais photographié intact avec les chapiteaux des colonnes engagées en 1964. La corbeille des chapiteaux ornée de larges feuilles plates est d’un modèle très courant au XIIième siècle. Chapiteau en 1964 Photo Bornecque
Cette date est encore confirmée par la qualité de la maçonnerie.
Le pilier de la crypte 1911 ? Photo sur verre Bib.Gren. ref : PvPPD119 Rappelons enfin que la crypte, brièvement mise au jour vers 1960 présente par sa disposition originale un vif intérêt et que des fouilles dans toute cette partie sont infiniment souhaitables.
Robert Bornecque.
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